D’abord, d’avoir eu de la chance.
Parce qu’au fond je n’ai jamais travaillé pour vivre.
Je considère que travailler pour vivre est un peu imbécile au point de vue économique.
J’espère qu’un jour on arrivera à vivre sans être obligé de travailler.
Grâce à ma chance, j’ai pu passer à travers les gouttes.
J’ai compris à un certain moment qu’il ne fallait pas embarrasser la vie de trop de poids, de trop de choses à faire, de ce qu’on appelle une femme, des enfants, une maison de campagne, une automobile.
Et je l’ai compris, heureusement, assez tôt.
Cela m’a permis de vivre longtemps en célibataire beaucoup plus facilement que si j’avais dû faire face à toutes les difficultés normales de la vie.
Au fond, c’est le principal.
Je me considère donc comme très heureux.
Je n’ai jamais eu de grands malheurs, de tristesse, de neurasthénie.
Je n’ai pas connu, non plus, l’effort de produire, la peinture n’ayant pas été pour moi un déversoir, ou un besoin impérieux de m’exprimer.
Je n’ai jamais eu cette espèce de besoin de dessiner le matin, le soir, tout le temps, de faire des croquis, etc.
Je ne peux pas vous dire plus. Je n’ai pas de remords
Marcel Duchamp. 1966.
GUNHEAD.HUILE SUR BOIS. 60 X 45 cm. Brussels. Collection privée.
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